Cochons d'or : L'industrie porcine en questions
de Jocelyne Porcher
Les femmes viennent d'une planète, nous dit-on, et les hommes d'une autre. Mais d'où viennent les cochons ? Bien loin de l'image idyllique de la petite ferme joyeuse des livres d'enfants, les cochons sortent par million de l'industrie porcine. Dans de nombreux pays, dont la France et le Québec, cette industrie internationale, qui gère l'essentiel du cheptel mondial d'un milliard de cochons, a accru la productivité du travail des hommes et des animaux de façon remarquable. En 1970, une truie sevrait seize porcelets par an. Elle en sèvre vingt-neuf aujourd'hui. Une unité de production de 1 000 truies et leurs 16 000 porcs peut être conduite par moins de huit personnes. La recherche de la performance a toutefois conduit à des transformations radicales du contenu du travail et de son sens. Il s'agit de produire " à tout prix et à n'importe quel prix ", mais pour qui et pour quoi ? Qu'est-ce que cela veut dire, travailler en production porcine industrielle aujourd'hui, pour les éleveurs, les salariés et les cochons ? De quoi est fait le travail ? De quoi n'est-il pas fait ?
Jocelyne Porcher est chargée de recherches à l'Inra (département Sciences pour l'Action et le Développement). Ses travaux portent sur la relation de travail entre les humains et les animaux en élevage. Elle a été éleveur, salariée en production porcine et technicienne agricole en bio avant de s'orienter vers la recherche scientifique.
Sommaire
Introduction
La production porcine, une industrie internationale
État des lieux en France (Bretagne) et au Canada (Québec)
La filière porcine industrielle en France
La filière porcine industrielle au Québec
Situation comparée de l'emploi en production porcine en Bretagne et au Québec
Le recrutement de salariés : une limite au développement de la filière industrielle
Travailler en production porcine industrielle
S'engager dans le travail
La passion du métier
Engager son corps
Accepter un rapport de pouvoir envers les animaux
Environnement et « bien-être animal »
Se défendre contre la souffrance
L'habitude
Archaïsme et modernité
Adhérer au système de production industriel
Souffrir au travail
Faudrait pas que maman me voit faire ça !
Premiers contacts
Des fissures dans le blindage
Les risques du métier
La « mauvaise image » de la production et des salariés
Une usure visible
Un étrange corps à corps avec les animaux
Faire face à la maladie
Faire face à la mort des animaux
L'euthanasie
Délégation de la « boucherie »
L'équarrissage
Le travail des femmes en porcheries : une lutte pour la reconnaissance
Maternités
Virilités
Tuer, une habitude difficile à prendre
Le prix du lien
Changer de métier
Violences symboliques et distorsions communicationnelles
La zootechnie, un outil de transformation des représentations
La zootechnie, « science de l'exploitation des machines animales»
Le statut de l'animal
Le problème zootechnique
Prédilection et sollicitude
Formations à la production porcine : représentations et réalités
Le déficit de stagiaires : un problème d'image ?
Un travail « physique » mais pas pénible
Un système dominant
Valeurs viriles et relation aux animaux
Formations à la production porcine au Québec
Communication de filière
La communication interne : un "nous" obligatoire en lieu et place du "je"
La communication externe
Conclusion
L'industrialisation de l'élevage, un processus de perte
Méthodologie des enquêtes
Bretagne
Enquêtes de psychodynamique du travail
Enquêtes auprès de femmes salariées
Enquêtes « Emploi »
Enquêtes de psychodynamique du travail au Québec
Références citées